Livre analysé
Références
Stoffel (Jean‐François), Compte rendu de O. Gingerich, « Le livre que nul n’avait lu : à la poursuite du “De Revolutionibus” de Copernic », in Revue des questions scientifiques, vol. 181, 2010, n°1, pp. 117 – 118.
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Owen Gingerich
Le livre que nul n’avait lu
À la poursuite du « De Revolutionibus » de Copernic
Gingerich (Owen), Le livre que nul n’avait lu : à la poursuite du « De Revolutionibus » de Copernic / traduit de l’anglais (USA) par Jean‐Jacques Szczeciniarz. – Paris : Dunod éditeur, 2008. – 337 p. – (Quai des sciences).
Écrit par un spécialiste réputé de l’histoire de l’astronomie, voici un livre pour les vacances qui se lit comme un roman policier. L’énigme à résoudre est la suivante : dans son suggestif mais discutable essai The Sleepwalkers : A History of Man’s Changing Vision of the Universe (1959 ; trad. fr. 1960), Arthur Koestler avait présenté le De Revolutionibus orbium cœlestium (1543) de Nicolas Copernic comme « le livre que nul n’avait lu ». Et il est vrai qu’excepté le livre I, l’ouvrage est « mortellement technique » (p. 28). Aussi ne dispose‐t‐on toujours pas, depuis la traduction d’Alexandre Koyré de ce premier livre (1934), de traduction française de l’entièreté du maître‐ouvrage de l’astronome polonais. Est‐ce à dire pour autant que Koestler avait raison ? Pour répondre à cette question, Gingerich a parcouru le monde entier durant une trentaine d’années afin de localiser et d’examiner toutes les copies conservées de la première (1543) et de la seconde (1566) édition de cette œuvre. Au terme de ce labeur, qui lui a permis de retrouver des copies ayant appartenues « à des saints, à des hérétiques et à des crapules, à des musiciens, des stars de cinéma, des sorciers et des bibliophiles » (p. 4), notre infatigable enquêteur a publié, en 2002, Annotated Census of Copernicus’ « De Revolutionibus », soit la description, en 400 pages, de chacune des 600 copies imprimées et retrouvées du magnum opus copernicien. L’étude des annotations contenues dans ces copies lui a permis non seulement d’établir formellement que Koestler avait « totalement tort » (p. 284), mais également d’identifier une belle parade de propriétaires de l’ouvrage — Gérard Mercator, Pontus de Tyard, Giordano Bruno, John Dee, Thomas Digges, Tycho Brahé, Galilée, Kepler, etc. —, de détecter, parmi ceux‐ci, ceux qui l’avaient réellement « travaillé » (ce n’est pas le cas de Galilée !) et enfin de déterminer ce qui, la plume à la main, avait retenu leur attention (pas forcément, comme on pourrait le croire, les passages exposant la cosmologie héliocentrique, mais bien les derniers passages très techniques).
Le présent ouvrage narre, de façon agréable, les hasards, les situations cocasses, mais aussi les rencontres qui ont émaillé cette recherche des copies du De Revolutionibus devant conduire à la publication du Census. Il ne nous fournit donc pas un exposé méthodique de la révolution copernicienne ou de son contexte (bien que de tels sujets soient naturellement abordés), mais il nous permet surtout d’assister à la « science en marche », telle qu’elle se pratique réellement, c’est-à-dire de manière bien souvent empirique. Aussi, au gré des aléas de cette enquête, sont abordés de nombreux thèmes forts différents : le cinquième centenaire de la naissance de Copernic (1973), la difficulté d’accéder à des collections privées, la regrettable décomposition de différents exemplaires partiels pour reconstituer un exemplaire complet, l’identification laborieuse des auteurs de marginalia, ou encore le vol de livres précieux…
Soulignons enfin que la traduction française a été assurée par J.-J. Szczeciniarz, lui‐même historien de la cosmologie et de la révolution copernicienne, ce qui constitue bien sûr un gage de fiabilité.
Le présent ouvrage narre, de façon agréable, les hasards, les situations cocasses, mais aussi les rencontres qui ont émaillé cette recherche des copies du De Revolutionibus devant conduire à la publication du Census. Il ne nous fournit donc pas un exposé méthodique de la révolution copernicienne ou de son contexte (bien que de tels sujets soient naturellement abordés), mais il nous permet surtout d’assister à la « science en marche », telle qu’elle se pratique réellement, c’est-à-dire de manière bien souvent empirique. Aussi, au gré des aléas de cette enquête, sont abordés de nombreux thèmes forts différents : le cinquième centenaire de la naissance de Copernic (1973), la difficulté d’accéder à des collections privées, la regrettable décomposition de différents exemplaires partiels pour reconstituer un exemplaire complet, l’identification laborieuse des auteurs de marginalia, ou encore le vol de livres précieux…
Soulignons enfin que la traduction française a été assurée par J.-J. Szczeciniarz, lui‐même historien de la cosmologie et de la révolution copernicienne, ce qui constitue bien sûr un gage de fiabilité.
